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La Queue-en-Brie, le Moyen-Âge.

 

Ceci nous fait arriver au Moyen-âge et là, nous l'avons vu, il reste déjà beaucoup plus de traces, ne serait-ce que le plessis et le pavé dont nous avons parlé plus haut.

 

Contrairement aux allégations de certains, qui viennent d'ailleurs d'avoir la preuve de leur erreur, il n'y avait pas de mur de fortification à proximité de la Tour : ils confondent les murs de soutènement de l'ancienne rue du village avec un système de défense.

Ce que l'on constate tout d'abord à l'analyse des relevés, c'est que l'importante citée celte puis gallo-romaine que nous avons décrit précédemment s'est rétrécie au point qu'il ne reste plus qu'un village de quelques dizaines de feux, recroquevillé au pied de la Tour et tapi derrière un mur d'enceinte.

Venant du Nord, par exemple de Bry-sur-Marne où il est possible de traverser la Marne, par la route de Villiers, on arrive sur une large esplanade formée par la jonction de la route de Villiers, de la rue du Pont Banneret et d'une voie, aujourd'hui disparue, qui suit, à l'extérieur du mur d'enceinte, le tracé de l'actuelle rue de Sébastopol pour rejoindre en ligne droite, après la traversée du Morbras, la forteresse située dans la Forêt Notre-Dame.

Au niveau de cette esplanade, le mur d'enceinte est percé d'une porte qui permet de rentrer dans le village par la seule rue qui le traverse.

Nous entrons donc dans le village par ce que nous appellerons "la partie Nord de la rue Jean Jaurès" (portion comprise entre la rue du Pont Banneret et la Place de la Tour) pour arriver Place de la Tour, mais la configuration est un peu différente d'aujourd'hui.

En effet, un muret de soutènement atténue la déclivité actuelle et impose à tout véhicule d'arriver directement sur la Place de la Tour qui sert avant tout de "plate-forme de retournement" pour les attelages.

Il y a malgré tout certainement un escalier de pierre permettant le passage des piétons, ne serait-ce que pour se rendre à l'Eglise. Une deuxième rue cependant aboutit aussi Place de la Tour, elle est à l'emplacement de l'actuelle rue du Général Leclerc, et vient de Gournay par la porte Est du village, porte située sensiblement au droit de l'entrée actuelle de l'Hôpital des Murets.

A l'autre extrémité de la Place de la Tour, à droite (au Nord) de cette dernière, contrairement à ce que l'on peut voir aujourd'hui, la déclivité reprend car la rue principale continue.

Elle continue pour former un premier lacet qui la fait revenir, après contournement du pied de la tour, à l'emplacement des anciens Services techniques, passer en contrebas de l'Eglise, entre l'ancienne Mairie et l'école Jean Jaurès (ni l'une ni l'autre n'existant à cette époque), pour former un second lacet, à proximité du mur d'enceinte, dans les propriétés qui donnent actuellement sur la rue du Général Leclerc et la partie de la rue du Four orientée Nord/Sud (qui n'existait pas à cette époque comme rue mais devait être constituée d'une venelle et d'escaliers de pierres).

Après le second lacet, la rue principale revient à nouveau vers l'Ouest en empruntant le tracé de la rue du Four (pour sa partie orientée Est/Ouest), de la rue de la Paix et traversant les propriétés qui sont sur le bas de la rue Jean Jaurès pour aller former un troisième lacet à proximité du versant Ouest du mur d'enceinte.

A noter qu'à cet endroit, une autre porte est pratiquée dans le mur d'enceinte, elle permet d'entrer dans le village en venant par la Croix-Saint-Nicolas de Noiseau, Sucy et autres lieux.

Cette route a aujourd'hui disparu et est remplacée par la route de la Libération, mais son tracé ressort clairement sur les relevés effectués ainsi que son passage sur le Morbras.

Enfin, du troisième lacet, la rue principale revient à "l'Abreuvoir" en passant en contrebas de l'ancienne Poste, en surplomb du Morbras.

L'aménagement de cette rue a nécessité la construction d'un ensemble de murs de soutènement dont la trace est parfaitement visible sur le parcellaire et dont bon nombre de portions, plus ou moins refaites, forment les fondations d'immeubles actuels ou la délimitation de propriétés.

De place en place, des cours desservent les pâtés de maisons qui se sont bâties dans les espaces délimités par les lacets de la rue principale et, entre les pâtés de maisons, des escaliers et des venelles permettent le passage d'un niveau à l'autre de la rue.

 

De l'autre côté du Morbras, comme nous l'indiquons dans l'article consacré au Jardin Botanique de Louis Noisette (voir dans cette rubrique, "Le devenir d'un jardin botanique oublié"), à cette époque il n'y a qu'un seul domaine.

Existe-t-il déjà un pont ou une passerelle sur le Morbras ? Ou ce Domaine est-il complètement séparé ?

Il n'est pas possible aujourd'hui de l'affirmer mais, en toute logique, on peut penser qu'il existe au moins une passerelle susceptible de supporter le poids des charrettes.

Rappelons aussi qu'à cette époque le Morbras est beaucoup plus large qu'aujourd'hui, bien que déjà canalisé, et son débit est aussi beaucoup plus fort.

En fait, dans cette autre partie du village est installé un ou plusieurs ordres monastiques (monastère ou couvent ou les deux) car dès la première croisade (fin du XIè siècle), une maladrerie est aménagée sur le territoire de La Queue.

 

Nous avons vu que déjà, à la période gallo-romaine, la ville est une ville de cure et que l'on y soigne les maladies de peau.

Ceci est lié à la présence d'une source chaude dont la teneur élevée en souffre présente des propriétés apaisantes, et même curatives dans certains cas.

Les premiers croisés (pour ceux qui en revinrent) ramenèrent de leur périple une grave maladie de peau, que l'on identifia plus tard comme étant la lèpre, et dont on ne savait soulager les douleurs que par les bains sulfurés et certains onguents.

C'est ainsi que fut créé un petit hameau pour abriter les lépreux, juste à l'extérieur du plessis d'accès à la ville - celui situé sensiblement à l'actuel carrefour de Pince-Vent - là où est implantée la zone industrielle de Chennevières-sur-Marne.

Malgré dix siècles passés, certains lieux conservent la mémoire d'antan, c'est ainsi qu'il existe toujours en limite des deux communes (Chennevières et La Queue-en-Brie) un lieu-dit "Les Sonnettes".

Il reste par ailleurs dans la cuvette de "Champlan", dépendances des ordres monastiques, les vestiges d'un ancien four à chaux qui servait à fabriquer la chaux vive dans laquelle étaient enterrés les malades décédés. Notons que le calcaire du sous-sol caudacien n'est pas utilisable pour la fabrication de la chaux, il fallait aller chercher le calcaire adapté à Bry-sur-Marne ou à Brie-Comte-Robert.

 

En plus de la nourriture nécessaire à la population du village, de l'approvisionnement de la véritable ville qu'était la forteresse, il fallait aussi assurer l'approvisionnement des malades, si bien que l'on peut penser qu'une grande partie des terrains plats, et de ceux en pente douce, alors aménagés en terrasses successives, qui formaient le Domaine était cultivée par les moines ou les soeurs.

On peut aussi raisonnablement penser que c'est vers ces époques que fut installé, au point culminant du Domaine, un système de pompage de l'eau, à partir d'un ensemble de puits, pour satisfaire les besoins en eau non seulement des habitants du Domaine mais surtout pour l'entretien des cultures.

Si plusieurs puits ont été localisés, le système de pompage semble avoir totalement disparu, il ne reste qu'un lieu-dit "La Pompe" et son chemin d'accès.

 

Là où se situe aujourd'hui la Villa de la Tour, est érigée la demeure du Prévôt ainsi que le casernement réservé au détachement de gens d'armes chargés de la sécurité et de la défense du village.

La Tour a été réaménagée en tour d'observation d'où l'on peut surveiller les différents plessis qui barrent les routes d'accès à la forteresse au Nord, Nord-Est et Nord-Ouest, communiquer avec eux et avec la forteresse ainsi que certainement avec un poste avancé situé au niveau d'Amboile (à Ormesson).

Cette petite garnison, régulièrement changée comme celles des plessis, avait pour mission la garde des portes du village, la surveillance du mur d'enceinte, la vérification du couvre-feux et le maintien de l'ordre dans le village.

Il est possible que cette garnison ait eu aussi un rôle stratégique en cas d'attaque de la forteresse.

 

Quant à la forteresse, que certains cherchent à tout prix à situer là où elle n'est pas, il nous a suffit de faire appel aux souvenirs de plusieurs caudaciens qui vécurent leur enfance dans notre ville avant la seconde guerre mondiale, et même encore après, pour qu'ils nous racontent avec passion leurs jeux dans les structures des anciennes fortifications.

Il est fortement dommageable que les travaux effectués à la demande du Conseil Général du Val-de-Marne dans sa propriété qui est devenue aujourd'hui le Parc Départemental des Marmouzets, à la fin des années 70 et au début des années 80, aient eu pour conséquence la destruction pure et simple des vestiges aériens restants de la forteresse dans cette zone.

Cependant, les relevés que nous avons effectués ces dernières années démontrent qu'une toute petite partie seulement de ces vestiges a été effacée, il n'y a qu'à gratter pour faire réapparaître les autres !...

La forteresse était conçue en forme d'étoile, c'est-à-dire qu'au lieu d'avoir un mur d'enceinte circulaire (ou de forme générale arrondie), le cercle inscrit était hérissé de pointes triangulaires en saillies.

Ce principe de fortification est des plus efficaces et rend la forteresse pratiquement imprenable car l'assaillant qui tente l'assaut d'un mur doit se prémunir à la fois du défenseur, au dessus de lui, qu'il attaque, mais aussi des défenseurs qui le surplombent, dans son dos, sur le mur opposé.

Les relevés ont permis de localiser quatre niveaux "concentriques" de défense autour de ce que l'on peu penser avoir été un énorme donjon dont la base serait aujourd'hui occupée par le Château des Marmouzets.

Compte tenu de la superficie de cette place forte, et en la comparant à d'autres places fortes connues telles Saint-Germain-en-Lay et Talmond Saint-Hilaire, on peut estimer entre quatre et six mille hommes d'arme la garnison, population à laquelle il faut ajouter les familles, mais pas nécessairement le clergé qui, bien qu'y ayant sa place en cas d'attaque, pouvait, en période de non-agression, être cantonné dans les monastères et couvents précédemment décrits.

Pour comprendre l'existence d'une telle forteresse située en pleine nature, il faut en comprendre l'importance stratégique et, pour cela, il faut se représenter le décor de cette époque.

 

La forteresse caudacienne n'a pas pour but de défendre le village, elle protège l'Est de la Capitale et son rôle est de tenir le plus longtemps possible et d'affaiblir au maximum tout assaillant qui se dirige vers PARIS !... N'oublions pas la maxime qui figure sur son blason qui date bien du Moyen-âge, "De Brie, toujours fidèle à la France".

Venant de l'Est, c'est-à-dire de Champagne, La Queue est à l'époque un passage obligé.

Nous l'avons vu - la forte hydrologie de la région et le sol constitué de plusieurs couches de marnes - rares sont les endroits où il est possible de faire passer des troupes en armes.

Depuis Ozoir-la-Ferrière, ce qui est aujourd'hui la RN4 (dans un tracé très peu différent) est le seul passage présentant les critères requis, et encore, elle offre un passage peu large, moins de dix mètres par endroit, au-delà duquel chevaux et machines de guerre risquent l'enlisement dans les marais qui la bordent.

L'assaillant éventuel va se heurter à un premier obstacle d'importance au niveau du passage actuel de la Francilienne, c'est un plessis constitué de deux imposantes constructions militaires, de part et d'autre du passage, dans les marais, et qui neutralisent le passage.

Il a pour rôle, l'alerte étant donnée, de bloquer sur place l'ennemi le temps nécessaire pour rentrer dans la forteresse les habitants des alentours et le maximum de provisions, et aussi pour mettre en place et déclencher le système d'interdiction de la traversée du Morbras (pour quelques dizaines de jours).


Arrivé à ce stade, le lecteur va exiger, à juste titre, un minimum d'explications que nous lui donnons immédiatement.

 

Il faut connaître les lieux pour comprendre que le Morbras ne peut être traversé, pour une armée de cette époque, que sur une toute petite partie d'environ quatre kilomètres, partie qui correspond sensiblement à son entrée sur le territoire de la ville jusqu'au Château d'Ormesson.

Avant, ce ne sont que des marécages où les passes les plus larges autorisent tout au plus une charrette, après les flancs de la vallée du Morbras sont trop abruptes pour que des machines de guerre et même des chevaux armés puissent les descendre.

Il suffit donc que les quelques kilomètres de passage possible soient rendus impraticables durant quelques jours pour qu'une armée assaillante soit bloquée sur le plateau Briard.

Les défenseurs de Paris ont alors tout leur temps pour couper le pont sur la Marne au niveau de Joinville (Le Pont), interdisant alors à l'ennemi de continuer sa progression vers la Capitale.

Dans ce cas, il ne reste plus à l'assaillant que l'alternative de faire demi-tour ou de tenter de rejoindre la route qui va à Melun (la fameuse voie Nord/Sud dont nous avons parlé plus haut) pour y traverser la Seine et remonter sur PARIS par le Sud (pour information, c'est le périple de Labiénus, décrit dans la Guerre des Gaules par César). Mais cette route lui est barrée par les deux premières enceintes de la forteresse.

Quant à la manière d'interdire la traversée du Morbras, il nous a fallu étudier attentivement les relevés des courbes de niveau pour nous rendre compte que sur la portion précédemment décrite, en quatre endroits la vallée est rétrécie.

Un des rétrécissement est naturel, c'est la faille d'Amboile, les trois autres ressemblent beaucoup plus à des constructions enfouies qui auraient pu permettre d'y placer un système de barrage du ruisseau.

Malgré tout, même en considérant qu'au Moyen-âge le débit du ruisseau était très supérieur à ce qu'il est aujourd'hui, il aurait fallu plusieurs jours pour que l'inondation provoquée ait les effet escomptés sur les marnes de la vallée.

Les cartes d'état-major levées en 1873 indiquent, le long de la vallée du Morbras, depuis Roissy-en-Brie et jusqu'à Ormesson, pas moins de huit "réservoirs substructuraux" (?).

Longtemps nous avons cherché ce qu'ils pouvaient être, jusqu'à ce que des moyens puissants d'investigation soient mis à la disposition de nos membres.

Et les relevés effectués sur l'un de ces réservoirs y révèlent deux ensembles circulaires de 250 mètres de diamètre ayant une épaisseur d'une douzaine de mètres et distant l'un de l'autre d'une dizaine de mètres.

Des informations complémentaires nous laissent penser que ces "édifices souterrains" auraient entre 15 et 18 mètres de profondeur.

Si ces hypothèses se révélaient exactes, un "réservoir substructural" des cartes d'état-major contiendrait une réserve de quelques un million et demi de mètres cube d'eau !... soit douze millions de mètres cube pour l'ensemble des réservoirs !... De telles quantités d'eau suffisent évidemment à noyer toute la vallée et la rendre impraticable pour un bon moment.

Que l'on n'aille pas croire à de la fiction.

Si nous nous permettons d'être aussi affirmatifs, c'est que les archives de la ville portent encore la trace de deux catastrophes survenue à la fin au XIXè siècle. Dans les deux cas, les témoins sont unanimes à décrire une gigantesque "vague" sur le Morbras, au niveau du village, qui submergea le pont d'au moins trois mètres et chaque fois l'emporta, mais la seconde fois, une petite fille qui gardait ses vaches dans les prés du Domaine de l'Hermitage fut emportée par le flot avec ses animaux, ainsi que l'instituteur qui se jeta dans le torrent pour tenter de la sauver. Les corps sans vie furent retrouvés à la faille d'Amboile !...

Ces tristes événements ne peuvent pas s'expliquer autrement que par la rupture soudaine des vannes de retenue d'un des réservoir, ou par le déclenchement inopiné du système d'ouverture.

 

Le rapporteur, René Esselin, Président de la S.C.I.A.M..