AVIS DE L'ASSOCIATION ESSOR CAUDACIEN CONCERNANT LE PROJET DE REVISION DU PLAN D'OCCUPATION DES SOLS DE LA VILLE DE LA QUEUE-EN-BRIE - AVIS DU 5 AVRIL 2001.
POTENTIEL ARCHEOLOGIQUE
Au regard du potentiel historique de la ville de La Queue-en-Brie, on imagine facilement ce que peut être son potentiel archéologique. Malheureusement aucun relevé et aucune étude technique cohérente d'ensemble n'avaient été publiés à ce sujet, ni avant le début de l'urbanisation qui date des années 50, ni après, jusqu'au rapport déposé par ESSOR CAUDACIEN dès octobre 1996 auprès des autorités compétentes (édition originale de la synthèse des relevés réalisés en date de janvier 1997).
On sait qu'au XVIIIème siècle, l'Abbé de la Grive avait tenté d'établir une carte détaillée de la commune en effectuant des recherches à partir des cartes royales des chasses et en effectuant des relevés sur le terrain, mais le manque de moyens fiables de l'époque ne lui a permis que de relever des séries d'anomalies dans la morphologie des terrains.
On sait aussi que Henri ROUART, durant les 21 années où il fut Maire de la commune, fit effectuer des recherches concernant le sous-sol caudacien, notamment en matière de souterrains, par des spécialistes, mais on ne trouve pas trace des résultats au niveau des archives.
On sait, par contre, que lors des travaux de construction de l'hôpital des Murêts (sur le domaine du Château du même nom, au début des années 60) qui ont détruit en presque totalité le magnifique parc boisé, les fondations des constructions se sont heurtées à de nombreuses constructions enfouies qui ont été elles aussi détruites sans qu'apparemment des relevés et analyses en aient été faits. Heureusement, des photographies aériennes des "travaux" ont été réalisées, dont certaines ont été publiées sous forme de cartes postales, et témoignent des problèmes rencontrés à cause du sous-sol.
Les seuls documents rigoureusement fiables à partir desquels il est possible d'effectuer des localisations par recoupement, sont les cartes d'état-major de la région, dressées entre 1870 et 1873 par le service cartographique des armées. Ces cartes sont précises, elles notent jusqu'au plus petit accident de terrain, et portent la position et l'indication de tout ce qui était visible à cette époque (y compris en sous-sol). C'est ainsi que l'on y découvre, tout au long et de part et d'autre de la vallée du Morbras, qui plus est en des points relativement élevés, des séries de "réservoirs substructuraux" qui ne correspondent à aucun repère aérien. L'étude archéologique réalisée par ESSOR CAUDACIEN sur une de ces zones fait ressortir deux silhouettes annulaires d'environ 250 mètres de diamètre intérieur et 12 mètres de corde, distantes d'une dizaine de mètres (l'échelle des documents qui servent de base à l'étude et l'enfouissement de ces structures - entre 8 et 15 mètres - ne permet pas une précision meilleure que plus ou moins 3 mètres). Quant à la profondeur éventuelle de ces "constructions", si profondeur il y a, le recoupement de diverses informations et l'étude des courbes de terrains la situent entre 15 et 18 mètres.
L'histoire récente de la ville de La Queue-en-Brie est marquée par deux catastrophes (voir Chroniques Caudaciennes), l'une au XIXème siècle et l'autre au début du XXème, où une énorme vague sur le Morbras, dépassant de près de trois mètres le pont de la rue Jean Jaurès - qui s'en est trouvé emporté - a, la seconde fois, fait deux victimes dont l'instituteur qui tentait de sauver une enfant emportée par le flot. Il est impossible, même par temps de fortes pluies, que le Morbras connaisse un tel phénomène qui ne s'explique que par l'arrivée brutale d'une très grande masse d'eau. Un ensemble de "citernes", comme nous venons de les décrire, représente un minimum de 3 millions de mètres cubes d'eau et de boues et peut éventuellement expliquer ces vagues en cas de rupture brutale.
L'étude du potentiel archéologique caudacien n'est pas simple car, contrairement à la majorité des sites connus où l'évolution d'une ville celte a continué jusqu'à nos jours, et où les soubassements des constructions actuelles portent la marque des époques successives de construction et de rénovation (comme le pied de la Tour dont nous avons parlé précédemment), la cité caudacienne semble avoir vécu en trois temps séparés par de longues périodes de veille.
Dans l'état actuel de nos recherches, on peut penser qu'une importante cité s'est développée jusqu'au IIème ou IIIème siècle de notre ère. Puis il semble que durant 6 ou 7 siècles, la vie et l'activité se soient limitées à la surface de ce que l'on appelle le Village et à la forteresse. Durant les Xème, XIème et XIIème siècles, l'urbanisation se serait de nouveau étendue, mais les traces localisées correspondent plus à des structures militaires qu'à des habitations rurales ou urbaines. Puis de nouveau, durant cinq ou six siècles, la vie se serait resserrée sur le Village (il est impossible actuellement de dire à quelle époque la forteresse a été abandonnée, mais il est peu probable qu'elle ait perduré au delà des premières décennies du XVIème siècle), et ce n'est qu'à partir du XVIIIème siècle que l'on voit réapparaître des constructions solitaires en dehors de l'éperon rocheux où trône la Tour, qui semble avoir toujours été le coeur de la cité.
On comprend tout le danger que présente ce genre de site. Tant que l'on est en présence de "villae" isolées qui, en général, aussi grandes soient-elles, ne comportent pas de substructures importantes, le fait qu'au cours du temps elles aient été recouvertes de quelques mètres de terre a provoqué peu ou prou l'effondrement des toitures et les cavités restantes présentent peu de risques majeurs pour des constructions réalisées en surface, seulement des fissures résultant du tassement et gonflement des terres enclavées.
Dans notre cas, c'est d'une ville dont il s'agit, avec toutes ses infrastructures vitales ou utiles où beaucoup d'équipements sont réalisés en sous-sol. Et le fait que les toitures s'écroulent ou que les superstructures aient été utilisées en "carrières de pierres" n'a pas pour autant comblé les cavités des sous-sols.
Voilà ce qui peut être dit dans le cas présent du potentiel archéologique de la ville de La Queue-en-Brie et des risques importants qu'il présente pour l'urbanisation.
Comme Monsieur le Préfet du Val-de-Marne l'a rappelé à Monsieur le Maire de La Queue-en-Brie dès 1996, et contrairement aux allégations de Monsieur François Rodriguez-Loubet, Conservateur Régional d'archéologie, très fortement critiqué par ses collègues (Nouvel Observateur n° 1876 - 19 au 25 octobre 2000 - TéléObs cahier spécial page VI), l'ensemble du territoire caudacien est à très haut potentiel archéologique, avec les risques qui lui sont inhérents.
Il est fortement regrettable que depuis cette date, et contrairement aux recommandations préfectorales, de nombreuses constructions aient été autorisées sans que des fouilles préalables n'aient été réalisées.
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